Le lundi 4 septembre, dans le cadre de la commémoration du 50e anniversaire du coup d’État du 11 septembre 1973, un groupe de jeunes de la Coordination des élèves du secondaire-ACES, ainsi que d’autres mouvements sociaux, se sont enchaînés aux grilles du siège principal de Santiago du parti pinochétiste Union Démocrate Indépendante (UDI), situé dans la commune de Providencia, en brandissant une banderole proclamant: « Nous lutterons jusqu’à effacer son héritage de misère et d’impunité.»
Se référant aux dirigeants de la formation d’extrême droite, les jeunes ont déclaré : « ceux qui sont ici ont non seulement empêché les changements permettant qu’on s’occupe des affaires des entrepreneurs, mais ils ont également été des promoteurs et des défenseurs de la dictature. Ce sont eux qui ont fait tout leur possible pour nous empêcher de retrouver nos proches détenus portés disparus, pour qu’il n’y ait pas de justice contre les responsables du massacre, en leur assurant une impunité totale », ajoutant : « ils ont défendu le modèle installé dans la dictature qui rend nos vies précaires, refusant l’éducation gratuite, de mettre fin au profit, la mise en œuvre d’une éducation sexuelle complète et tous les progrès que nous exigeons depuis des années pour nos vies et notre éducation. Ici se trouvent les négationnistes du coup d’État, qui protègent bec et ongles l’héritage de Pinochet ».
La manifestation pacifique a été rapidement réprimée par les forces spéciales des carabiniers, comme c’est désormais une pratique courante dans un pays contrôlé par la police où l’administration en fonction de La Moneda, quelle que soit sa couleur, opère en appliquant la violence d’État contre tout type de dissidence à l’égard de l’ordre établi autoritaire, antidémocratique et conservateur. Il s’agit d’un nouvel incident qui exprime la droitisation alarmante des institutions dominantes. De fait, tandis qu’en haut, le gouvernement de la “Gauche” (Frente Amplio) cède à tous les niveaux aux intérêts et à l’agenda du grand capital et de l’État capitaliste usaméricain, et tente de parvenir à un “consensus civilisateur” sur un discours commun sur le cinquantenaire du coup d’État de 1973 avec la droite pinochétiste avant le 11 septembre, en bas, les coûts de la récession économique actuelle sont facturés aux classes travailleuses et populaires par le biais du chômage, de l’augmentation de l’emploi informel, de la flambée des prix des aliments de base et de l’énergie, et d’un ajustement structurel antipopulaire en bonne et due forme ».
8 femmes et 4 hommes ont été brutalement arrêtés par des agents en uniforme à l’extérieur des locaux de l’UDI, et emmenés au poste de police n°19 dans le quartier de Providencia. Mais la répression ne s’est pas arrêtée là. Dans la nuit du 4 septembre, au vu et au su de leurs familles, amis, avocats et organisations de défense des droits humains, ils ont été emmenés au poste de police n°1 de Santiago, où ils ont été fichés et ont dû passer la nuit en garde à vue. Le matin du 5 septembre, les jeunes détenus ont été déférés aux tribunaux correspondants où, comme aucun d’entre eux n’avait d’antécédents, ils ont finalement été libérés, non sans avoir au préalable été sanctionnés par une interdiction d’accès aux locaux de l’UDI et 100 jours sous enquête pour la peinture rouge qu’ils ont jetée, considérée comme dommages et désordre par le tribunal.
Seules les commémorations approuvées par le gouvernement de Gabriel Boric, comme la projection d’images des visages des détenus disparus sur la façade de La Moneda, sont autorisées. Une autorisation qui ne garantit pas nécessairement d’éviter le déploiement de la violence répressive des carabiniers contre la communauté qui se souvient et transforme en promesse d’avenir les 3 seules années de l’histoire du Chili où les travailleurs et les opprimés, dans leur tentative de monter à l’assaut du ciel, ont touché le futur du doigt.