La présidence réveille un âpre conflit au sein de la classe dirigeante usaméricaine

La direction du Parti démocrate pourra-t-elle limiter la lutte contre Trump et se contenter de s’attaquer à son crime de recherche d’avantages électoraux étroits ? Ou bien les gens vont-ils briser ces limites et commencer à se battre pour leurs propres intérêts ?

Un âpre conflit entre les deux principaux partis politiques représentant l’impérialisme usaméricain se profile à l’horizon de l’année à venir. Le premier round aura lieu au Sénat, lors du procès qui suivra le vote de la Chambre des représentants visant à destituer le président. Le deuxième round sera l’élection présidentielle de novembre.

Les partis républicain et démocrate sont tous deux les ennemis des travailleurs du monde entier. Ils sont tous deux ennemis de la classe ouvrière aux USA. Néanmoins, le monde entier  suivra ce conflit. Il touche tout le monde.

Ce conflit – interne à la classe dirigeante impérialiste usaméricaine – aura-t-il lieu d’une manière qui permette aux travailleurs ordinaires aux USA d’intervenir dans leurs propres intérêts ? Cela semble peu probable à l’heure actuelle, mais des choses plus surprenantes se sont produites.

Selon la Constitution usaméricaine, pour destituer un président, la Chambre des représentants doit voter, à la majorité simple, pour porter des accusations contre un président en exercice, accusations qu’elle considère suffisamment graves pour le démettre de ses fonctions. Le Sénat organise ensuite un procès sur la base de ces accusations. Pour condamner et démettre le président de ses fonctions, il faut au moins un vote des deux tiers au Sénat.

Dans l’histoire des USA, le président Andrew Johnson a été destitué en 1868 et Bill Clinton en 1998. Ni Johnson ni Clinton n’ont été condamnés par le Sénat. Les républicains contrôlent le Sénat d’aujourd’hui. Rien n’indique pour l’instant que ces républicains vont déclarer Trump coupable.

La Présidente de la Chambre, Nancy Pelosi, une démocrate de premier plan, dit qu’elle n’enverra les ordres de destitution au Sénat que lorsque les dirigeants républicains y garantiront un « procès équitable ». Pelosi entend par là un procès où les démocrates peuvent faire appel aux anciens collaborateurs de Trump pour témoigner sous serment. Et qui les démocrates veulent-ils appeler comme témoin ? Personne d’autre que le faucon John Bolton.

Les stratèges impérialistes d’avant 2016 – dont Bolton – avaient basé la domination mondiale des USA sur une alliance avec d’autres puissances impérialistes (Europe de l’Ouest, Japon, Australie). Comme dans l’OTAN, les USA sont la puissance hégémonique et font le gros du travail militaire et se taillent la part du lion du pillage impérialiste. Trump a contrarié ces stratèges lorsqu’il a semblé menacer l’OTAN.

Pour des raisons complètement différentes, Trump a gagné la haine de larges pans de la population usaméricaine  et du monde. Il a fait des commentaires incessants, insensibles et grossiers, calomniant les Latino-Américains et les Africains, insultant les femmes. Il provoque une violence d’extrême droite.

Dans ses programmes politiques, il a fait la guerre aux pauvres. Il a nommé des juges fédéraux anti-femmes. Pendant ce temps, il a accordé des réductions d’impôts aux riches, tout en ouvrant les terres et les ressources naturelles indigènes aux entreprises pour qu’elles les pillent ; pour cela, les 0,001% des plus riches continuent à verser des contributions à la campagne politique de Trump.

Parmi tous ses crimes, la direction du parti démocrate en a choisi un à dessein, sur lequel Trump a affronté les stratèges de la guerre froide. Il a refusé l’aide militaire au régime de droite antirusse en Ukraine. Il a fait pression sur le président ukrainien pour qu’il enquête sur Hunter Biden, le fils de Joe Biden, qui avait un emploi confortable dans une entreprise ukrainienne. Trump a fait cela pour obtenir des avantages électoraux étroits.

En choisissant ce crime, les démocrates essaient de montrer qu’ils sont plus efficaces pour représenter les intérêts impérialistes. Ils l’ont également fait en soutenant presque unanimement le nouveau budget du Pentagone, qui a été adopté par la Chambre pour un montant énorme de 738 milliards de dollars en décembre. C’était au même moment qu’un décret présidentiel était sur le point d’éjecter près d’un million de personnes, dont de nombreux enfants et personnes âgées, des bons d’alimentation et de les plonger dans la famine.

L’une des rares démocrates progressistes qui se sont opposés à cette concession au complexe militaro-industriel, la députée Rashida Tlaib du Michigan, a déclaré qu’elle « ne peut pas appuyer un projet de loi qui prévoit 738 milliards de dollars pour les guerres et les entrepreneurs de la défense alors que cette année nous n’avons fourni que 190 milliards de dollars de financement discrétionnaire pour les soins de santé, l’éducation et la création d’emplois ». La députée Tlaib, qui est l’une des quatre représentantes de couleur connues sous le nom de « l’escouade » (The Squad), a également critiqué la guerre financée par les USA contre le Yémen, la nouvelle force spatiale et les nouvelles armes nucléaires prévues dans le projet de loi.

Trump apporte un soutien politique aux politiciens impérialistes et racistes du monde entier, comme Boris Johnson en Grande-Bretagne, Marine Le Pen en France, Matteo Salvini en Italie, qui chamboulent la solidarité de la classe ouvrière. Avec ses tweets racistes, le président a empoisonné l’atmosphère politique, divisant les travailleurs usaméricains sur la base de la race, du sexe et de la religion.

Il y a beaucoup de gens aux USA qui détestent – et certains qui ont peur – Trump pour de bonnes raisons. Des milliers de personnes dans tous les USA ont manifesté le 17 décembre dans des dizaines de villes pour soutenir le processus de destitution. À d’autres moments au cours des trois dernières années, ces forces ou des forces similaires ont protesté par millions contre la misogynie du président, ont exprimé leur solidarité avec les migrants ou ont défendu l’environnement à diverses occasions.

Pour ces personnes, la direction du Parti démocrate n’a offert que le choix de se ranger du côté du régime réactionnaire ukrainien et de l’impérialisme usaméricain contre la Russie. C’est le Parti démocrate sous le gouvernement de Barack Obama qui a renversé l’ancien gouvernement de l’Ukraine, permettant même aux forces profascistes d’entrer dans le nouveau régime. Prendre parti dans cet effort n’a rien à voir avec les intérêts réels des travailleurs usaméricains.

Non seulement les gens de la petite gauche anti-impérialiste, mais même certains membres du Congrès du Parti démocrate, comme le représentant Al Green du Texas, un Africain-Américain, ont demandé que M. Trump soit inculpé dans le cadre du processus de destitution pour incitation à la violence fondée sur ses commentaires racistes.

La présidence de Trump a suscité des protestations progressistes contre son programme de haine. Les personnes handicapées ont mené la lutte pour les soins de santé ; les enseignants des États qui ont voté pour Trump ont organisé des grèves de défi. Les femmes ont mené des protestations contre les abus sexuels et pour leur libération. Les personnes d’origine latino-américaine ont mené des manifestations de solidarité avec les migrants. Les peuples autochtones ont mené des manifestations contre la crise climatique et pour protéger la terre.

La direction du Parti démocrate pourra-t-elle limiter la lutte contre Trump et se contenter de s’attaquer à son crime de recherche d’avantages électoraux étroits ? Ou bien les gens vont-ils briser ces limites et commencer à se battre pour leurs propres intérêts ?

John Catalinotto, Spécial pour La Pluma y Tlaxcala, le 28 décembre 2019

Original: Presidency awakens conflict within U.S. ruling class

Traduit par Fausto Giudice Фаусто Джудиче فاوستو جيوديشي

Publié par La Pluma et Tlaxcala

Traductions disponibles: Español