Pour les Golden Boys de la barbouzerie israélienne, ça commence par la terreur et ça finit par la course au grisbi

Avant de continuer à encourager les jeunes à rejoindre la 8200 et à être fiers de cette unité, nous devons nous rappeler que cette pourriture en est aussi sortie.

Les anciens combattants de la célèbre unité israélienne de renseignement électromagnétique et de décryptage de codes, déjà bien versés dans la violence contre les démunis, se livrent maintenant à un business putride à l’étranger.

Une coïncidence a réuni deux histoires sur Haaretz mercredi dernier. L’une d’elles faisait état de l’abus sadique de deux Palestiniens par des soldats du bataillon Netzah Yehuda, tandis que l’autre évoquait l’étonnante ingérence à l’étranger d’entreprises israéliennes du renseignement. Apparemment, la conduite du bataillon est plus répugnante. Mais en fait, les actions des anciens combattants du Mossad et de l’unité de renseignement sur les transmissions de l’armée, la 8200, sont beaucoup plus troublantes.

Une base de l’Unité 8200 dans le centre d’Israël. Photo David Bachar

Les soldats violents seront punis dans une certaine mesure ; ils viennent généralement des marges de la société. Mais les vétérans des cyber-agences top secrètes d’Israël sont la nouvelle élite, les héros de notre temps, beaux et prometteurs, le fier avenir de l’innovation et de la haute technologie. Qui ne veut pas que son fils ou sa fille serve dans la 8200 ? Qui n’est pas fier du travail du Mossad ?

Mais certains de ces braves gens font des choses pas jolies-jolies, pas moins exaspérantes que de frapper un Palestinien aux yeux bandés devant son fils. À la 8200, ils ne tuent pas les gens ou ne les tabassent pas, mais les dommages causés par les anciens combattants de l’unité ne sont pas moins graves.

Les réussites sont nombreuses. Le but du jeu est de démarrer une entreprise, de sortir rapidement et de prendre l’argent. En T-shirts, baskets et jeans, ils se font de l’argent à la pelle. Pendant leurs pauses de l’après-midi, ils commandent des sushis et jouent aux jeux vidéo “FIFA 17” et “Mortal Kombat”.

La plupart d’entre eux viennent de la 8200. Sous leurs succès impressionnants, il y a de la pourriture. Les anciens combattants de la plus grande et peut-être de la plus prestigieuse unité de l’armée, les nouveaux pilotes, savent tout. Parfois, c’est trop.


Un long et troublant article d’Adam Entous et Ronan Farrow dans The New Yorker parle de ces compagnies, en particulier Psy-Group, composé de vétérans  de la 8200 et du Mossad. Il n’y a pas d’endroit au monde où ils n’interviennent pas – du Gabon à la Roumanie, des Pays-Bas aux élections usaméricaines. Il n’y a rien non plus qu’ils ne feront pas : l’argent permet tout.

Le Project Butterfly (Projet Papillon), la guerre déclarée par les cyber-mercenaires israéliens sur les campus usaméricains contre le mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions, a été particulièrement répugnante. Le Groupe Psy, avec des membres du club des vieux garçons – Ram Ben-Barak, ancien chef adjoint du Mossad et candidat à la Knesset du parti Yesh Atid [Il y a un futur], et Yaakov Amidror, général et ancien conseiller à la sécurité nationale – ont espionné des militants anti-Israël sur les campus usaméricains et recueilli des ragots sur eux.

C’est comme une guerre, a dit le héros Ben-Barak au New Yorker. La société privée israélienne travaille sur les campus usaméricains contre des militants politiques pour 2,5 millions de dollars par an. Cet argent a été donné par des juifs (à qui on avait promis qu’ils “investissaient dans l’avenir d’Israël”), dont certains ont des enfants qui sont étudiants sur ces mêmes campus.

Imaginez qu’une entreprise étrangère espionne des étudiants de droite en Israël et répande des calomnies à leur sujet. Mais Israël a le droit de faire n’importe quoi. Uzi Arad, ancien conseiller à la sécurité nationale du Premier ministre Benjamin Netanyahou et vétéran du Mossad, a déclaré au New Yorker qu’il avait honte de ces mercenaires. Ces actions sont menées par les meilleurs de nos jeunes.

Selon le New Yorker, les sociétés israéliennes contrôlent le marché mondial de la désinformation et de la manipulation. Elles ont un énorme avantage. Comme Gadi Aviran, fondateur de la société de renseignement Terrogence, l’a dit au magazine : « Il y avait un énorme réservoir de talents qui sortait de l’armée chaque année », et « Tout ce qu’une compagnie comme la mienne avait à faire, c’était de se tenir à la porte et de dire : “Tu as l’air intéressant”. »

Ça commence toujours par la terreur, réelle ou imaginaire, et ça se termine par la course au grisbi. Tout d’abord, nous avons un ” énorme vivier de talents ” qui connaît bien les ruelles de Jabalya et de Jénine en Cisjordanie, où la violence contre les plus démunis est bien connue.

Les terrains d’entraînement de l’industrie israélienne de l’armement, les bombardiers sans pilote et les joysticks mortels ont apporté beaucoup de prestige et d’argent à l’État. Maintenant, dans l’esprit de l’époque, nous avons les fouineurs venus des sommets du Mossad et de la 8200.

Et quand un jour quelqu’un demandera d’où vient l’audace de s’immiscer ainsi dans la vie des gens, nous citerons Amidror, qui a dit : « Si les gens sont prêts à le financer, ça me va. » Avant de continuer à encourager les jeunes à rejoindre la 8200 et à être fiers de cette unité, nous devons nous rappeler que cette pourriture en est aussi sortie.  

Gideon Levy جدعون ليفي גדעון לוי

Original: For Israel’s Golden Intel Boys, it starts with terror and ends with greed

Traduit par Fausto Giudice Фаусто Джудиче فاوستو جيوديشي

Source: Tlaxcala, le 17 février 2019